Le GEM-R de l’UNESCO et l’ADEA lancent le deuxième rapport Pleins feux sur l’apprentissage fondamental
L’Union Africaine et la Zambie s’engagent à établir un cadre d’évaluation de l’apprentissage pour l’Afrique
Le ministre zambien de l’éducation, M. Douglas Syakalima, a lancé le deuxième rapport continental et le rapport national Zambien sur l’apprentissage fondamental le 7 mai lors de la Conférence 2024 de la Fédération africaine des autorités de régulation de l’enseignement à Lusaka, en Zambie. Le Rapport mondial de suivi sur l’éducation de l’UNESCO (UNESCO-GEM-R), en partenariat avec l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA), l’Union africaine (UA) et le ministère de l’éducation de Zambie, a collaboré à la production des rapports de cette année intitulés « l’apprentissage compte ». Il s’agit du deuxième rapport de la série Spotlight Report consacré à la numératie fondamentale en Afrique.
L’édition 2024 Pleins feux a examiné comment les pays alignent leur vision nationale sur l’élaboration des programmes scolaires, la fourniture de manuels, le soutien aux enseignants et les pratiques d’évaluation qui favorisent l’apprentissage fondamental. Les conclusions de cette édition montrent que les enseignants ont du mal à traduire efficacement le programme scolaire en action dans la salle de classe parce qu’ils manquent de soutien pour combler leurs lacunes en matière de connaissances et parce que les conditions de travail dans la salle de classe sont défavorables. Le rapport souligne également l’importance de manuels scolaires et de guides de l’enseignant cohérents, qui sont des outils essentiels pour la mise en œuvre de l’apprentissage fondamental.
Lors de la séance de lancement animée par l’ADEA, le Dr Manos Antoninis, directeur du rapport GEM, a déclaré :
« Les enseignants sont voués à l’échec s’ils n’ont pas le matériel adéquat pour enseigner ce que l’on attend d’eux. Nous n’enverrions pas un médecin sans stéthoscope, par exemple. Pourquoi devrions-nous supposer que les enseignants peuvent enseigner sans matériel pédagogique pertinent et actualisé dans les langues appropriées. Sans cela, nous transformons effectivement les enseignants en interprètes et en traducteurs en plus de leur travail quotidien ».
L’Union africaine et le gouvernement zambien se sont engagés à élaborer un cadre d’évaluation commun pour l’apprentissage en Afrique, une recommandation clé du rapport qui démontre ainsi sa valeur. Selon M. Syakalima, ministre de l’Éducation de Zambie :
« En s’appuyant sur son expérience en matière d’évaluation des apprentissages fondamentaux, la Zambie est prête à contribuer à l’élaboration d’une approche africaine commune pour le suivi des acquis de l’apprentissage, qui est essentielle pour atteindre les objectifs continentaux et mondiaux en matière d’éducation, tels qu’ils sont décrits dans le CESA 16-25 et l’ODD 4. »
De même, la responsable du département de l’éducation à la Commission de l’Union africaine, Mme Sophia Ashipala, a démontré la volonté de l’UA d’utiliser le mécanisme LEARN (Leveraging Education Analysis and Results Network), en travaillant avec les États membres pour développer un cadre commun pour l’évaluation de l’apprentissage. Selon elle,
« Les ministres africains de l’éducation ont demandé que les États membres reconnaissent le manque de données pour évaluer les progrès de l’apprentissage comme un défi majeur et ont demandé à la Commission de mettre en œuvre des orientations sur l’utilisation de l’évaluation de l’apprentissage. L’Union africaine soutient le dialogue et travaille avec ses partenaires dans le cadre de la Stratégie continentale de l’éducation pour l’Afrique (CESA) et avec l’ADEA et le GEM-Report pour mettre en place un cadre d’évaluation commun pour l’apprentissage fondamental et la réalité en Afrique. »
Remerciant le ministre Syakalima pour ce lancement, Shem Bodo, chargé de programme senior à l’ADEA, a rappelé que les compétences fondamentales sont essentielles pour tous les apprentissages ultérieurs et le développement des compétences qui permettent aux enfants d’atteindre leur plein potentiel et de contribuer au développement durable. Il a ajouté que ;
« Les nouvelles données et preuves - grâce à la série Spotlight - sont essentielles pour susciter davantage d’engagements et d’actions politiques ». Les preuves présentées dans les deux rapports exigent que l’on agisse en faisant avancer les recommandations du rapport, en tirant parti du mécanisme LEARN et en recherchant des solutions africaines communes parce que nos enfants sont nés pour apprendre et que l’apprentissage compte ».
Le rapport pleins feux de 2024
Lors de la présentation du rapport 2024, M. Manos a fait remarquer que les dernières statistiques sur la non-scolarisation et l’achèvement des études témoignent du défi auquel les pays sont confrontés chaque jour. Sur 100 enfants en Afrique, 18 ne sont pas scolarisés, soit deux fois plus que dans le reste du monde. Cependant, il y a un signe d’amélioration, avec des taux d’achèvement qui ont augmenté régulièrement de près d’un point de pourcentage par an au cours des 20 dernières années. En outre, les taux d’apprentissage à la fin du primaire se sont améliorés plus rapidement en Afrique que dans le reste du monde depuis 2011. Toutefois, le défi reste de taille : aujourd’hui, un enfant sur cinq au plus atteint le niveau minimum de compétence en lecture et en mathématiques à la fin de l’école primaire.
Il est essentiel de disposer de manuels scolaires actualisés et pertinents. Or, le rapport constate que les manuels sont souvent dépassés et rédigés dans la mauvaise langue. Les manuels sont arrivés huit ans après le programme du premier cycle du primaire en Ouganda et 9 à 12 ans plus tard en Afrique du Sud, par exemple. Au Niger et en Mauritanie, les enseignants utilisent des manuels et des guides pédagogiques qui datent d’une décennie ou plus par rapport au nouveau programme. Les manuels ne sont pas rédigés dans la langue d’enseignement pour 80 % des élèves en Zambie et dans moins de la moitié des salles de classe visitées pour le rapport en Ouganda.
Les manuels et les guides de l’enseignant peuvent ne pas être totalement alignés sur le programme scolaire. Au Niger, les manuels et les guides de l’enseignant incluent les statistiques et les probabilités, mais le programme scolaire ne le fait pas.
Il s’avère parfois que les évaluations s’écartent du programme scolaire. Par exemple, la Mauritanie a évalué l’algèbre, qui ne fait pas partie du programme. En Afrique du Sud, l’évaluation en classe ne couvre que deux des cinq domaines d’apprentissage.
Les guides de l’enseignant et les plans de cours peuvent aider les enseignants à suivre les objectifs du programme d’études. Cependant, les résultats montrent qu’ils sont utilisés de manière incohérente, ce qui nécessite une révision de leur conception. Le rapport note qu’environ trois enseignants sur cinq en Afrique du Sud et en Ouganda et plus de quatre sur cinq en Mauritanie et en Zambie disposent d’un guide de l’enseignant, bien que des pénuries ou des retards dans la fourniture aient été constatés.
La formation professionnelle continue est également importante pour améliorer les connaissances des enseignants et actualiser leurs qualifications, ce à quoi le rapport montre que la technologie contribue. En Afrique, 17 % des pays exigent une licence pour enseigner, contre 62 % des pays dans le monde, alors que les qualifications des enseignants sont souvent inférieures aux exigences. Le rapport souligne l’importance de la formation. Parmi les enseignants du primaire interrogés dans les 14 pays du Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN 2019 (PASEC), seuls 35 % maîtrisaient les procédures de base en mathématiques. Les différences dans les connaissances disciplinaires des enseignants expliquent plus d’un tiers de la variation des résultats des élèves d’un pays à l’autre.
L’éducation ne figure plus parmi les priorités des gouvernements, malgré un déficit de financement annuel de 28 milliards d’USD pour atteindre les objectifs des pays eux-mêmes, à savoir un taux d’achèvement de l’enseignement primaire de 85 % d’ici 2030. Les financements extérieurs sont de moins en moins une source de revenus pour les gouvernements et sont moins susceptibles de soutenir l’apprentissage fondamental.
Le rapport recommande ce qui suit
- Donner un manuel à tous les enfants et un guide à tous les enseignants : Veiller à ce que tous les enfants et les enseignants disposent de matériel d’enseignement et d’apprentissage fondé sur la recherche, aligné sur le programme scolaire et élaboré au niveau local.
- Enseigner à tous les enfants dans leur langue maternelle - et former les enseignants en conséquence : Donner à tous les enfants la possibilité d’apprendre à lire dans une langue qu’ils comprennent et à tous les enseignants la confiance nécessaire pour les aider.
- Fournir un repas scolaire à tous les enfants : Donner à tous les enfants les conditions minimales pour apprendre à l’école.
Au niveau du système
- Établir un plan clair pour améliorer l’apprentissage.
- Développer un cadre continental commun pour le suivi des résultats de l’apprentissage.
- Établir des normes d’apprentissage claires et aligner les évaluations pour déterminer dans quelle mesure les étudiants les respectent.
- Se concentrer sur le développement des compétences de base dès le début afin de soutenir les capacités cognitives avancées plus tard.
- Développer les capacités des enseignants : Déployer des formations rentables pour s’assurer que tous les enseignants utilisent efficacement le temps passé en classe.
- Préparer les responsables pédagogiques : Restructurer les mécanismes de soutien aux enseignants et aux écoles.
Au niveau continental
- Apprendre de ses pairs : Redynamiser les mécanismes permettant aux pays de partager leurs expériences en matière d’alphabétisation et de numératie fondamentales.
Au niveau international
- Concentrer l’aide sur le renforcement des institutions : Passer des projets à la fourniture de biens publics qui soutiennent l’apprentissage fondamental.